فایل کامل مجلّه مطالعات زبان فرانسه دو فصلنامه علمی پژوهشی زبان فرانسه دانشکده زبانهای خارجی دانشگاه اصفهان

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tâ çéå wx w|xâ revue des études de la langue française revue semestrielle de la faculté des langues étrangères de l'université d'ispahan cinquième année, n° 8 printemps-eté 2013, issn 2008- 6571 issn électronique 2322-469x cette revue est indexée dans: ulrichsweb: global serials directory http://ulrichsweb.serialssolutions.com doaj: directory of open access journals http://www.doaj.org islamicword science citation center http://www.isc.gov.ir sid: scientific information database http://www.sid.ir journals database (magiran) http://www.magiran.com ministry of science, research and technology http://www.msrt.ir bjm electronic database http://www.uijs.ui.ac.ir/relf instructions éditoriales 1. revue des études de la langue française publie des articles en français, dans des domaines comme la littérature, la linguistique, la didactique des langues, les théories littéraires et la traductologie. 2. revue des études de la langue française est semestrielle. 3. les articles devront être inédits (ne pas avoir été déjà publiés ou soumis à une autre revue). 4. la soumission se fait uniquement en ligne: www.uijs.ui.ac.ir/relf. 5. l'article doit comprendre: le résumé, les mots clés, l’introduction, le développement, la conclusion et la bibliographie, avec le résumé en anglais et en persan. 6. l'article doit faire entre 4500 et 7000 mots. il sera précédé d’un résumé en français (de 150 à 200 mots) avec 5 à 7 mots clés, et de sa traduction en anglais et en persan (pour les auteurs qui ne connaissent pas le persan, l’éditorial s’en prendra la charge). 7. l'article doit être présenté sous word, times new roman 12 et 1.5 d’interligne pour le corps du texte. 8. les citations de plus de 4 lignes feront l'objet d'un paragraphe séparé et elles seront mises en retrait par rapport à la marge de gauche et seront mises entre guillemets. elles devront être en caractère 10 et en interligne single. 9. l'auteur utilisera des italiques pour citer des mots ou des phrases dans une autre langue que le français et en fournira la traduction. 10. l'auteur utilisera des italiques dans le cas d'ouvrages cités dans le texte. 11. la bibliographie sera située à la fin de l'article et sera précédée par la mention bibliographie. 12. l'auteur utilisera le protocole apa. les articles ne satisfaisant pas à ce protocole ne seront pas examinés. livres: mounin, g. (2008). les problèmes théoriques de la traduction. paris: gallimard. articles: thoiron, ph. & béjoint, h. (2010). la terminologie, une question de termes?. meta, 55/1: 105-118. sitographie: rheaume, j. (1998). apprivoiser la technologie éducative, éléments de cours. http://www.fse.ulaval.ca/fac/ten/tv/plxx135.html#bib. consulté le 20 mai 2001. 13. les ouvrages d’un même auteur parus dans la même année seront distingués par des lettres minuscules (a, b, c) juste après la date de publication. 14. la référence des citations dans le texte: «chaque langue structure la réalité à sa façon et, par là même, établit les éléments de la réalité qui sont particuliers à cette langue donnée» (mounin, 2008: 44). 15. les notes en bas de page seront placées au bas de chaque page et non à la fin de l'article. elles doivent être situées immédiatement après le passage auquel elles renvoient et avant la ponctuation. les notes en bas de page seront numérotées consécutivement en chiffres arabes. elles ne devront pas être utilisées pour citer des références bibliographiques, mais pour faire des commentaires substantiels susceptibles d'éclairer un point. 16. tous les articles seront soumis à des évaluations sur une base anonyme. 17. la rédaction de la revue se réserve le droit de refuser ou d’apporter des corrections aux textes lors de leur évaluation. revue des études de la langue française revue semestrielle de la faculté des langues étrangères de l'université d'ispahan cinquième année, n° 8, printemps-eté 2013 issn 2008- 6571 issn électronique 2322-469x directeur: shokrian zeini, mohammad javad [email protected] rédacteur en chef: gashmardi, mahmoud reza [email protected] directeur-adjoint: salimikouchi, ebrahim [email protected] directrice exécutive: kazemi, nadia 03117932115 éditrice: azimi meibodi, nazita [email protected] éditeur des résumés anglais: shahnazari, mohammad taghi [email protected] mise en page par: abrary, tayebeh 03117932115 comité de rédaction abassi, ali maître de conférences université shahid beheshti,téhéran, iran asghari tabrizi, akbar professeur émérite université d'ispahan, ispahan, iran beikbaghban, hossein professeur émérite umb, strasbourg, france djavari, mohammad hossein professeur université de tabriz, tabriz, iran foroughi, hassan professeur université shahid chamran, ahvaz, iran gashmardi, mahmoud reza maître de conférences université d'ispahan, ispahan, iran raguet, christine professeur université de la sorbonne nouvelle (paris iii), france salimikouchi, ebrahim professeur assistant université d'ispahan, ispahan, itan shaïri, hamid-réza maître de conférences université tarbiat modares, téhéran, iran adresse postale : revue des études de la langue française, faculté des langues étrangères de l'université d'ispahan. université d'ispahan, ispahan, iran. c.p.: 81744- 73441 téléphone: 0098 3117932115 télécopie: 0098 3116687391 adresse électronique: www.uijs.ui.ac.ir/relf table des matières ressorts écofictionnels de la nouvelle «fragment du livre de la mer» de roland wagner e. esfandi la négation en tant que processus de la signification: le cas des discours littéraires s. kariminejad, h.r. shairi, p. safa & l. nabavi décepteur des contes renardiens et déstructuration de la cellule familiale: fonctionnalité et significations j. r. k. kouacou de la linguistique descriptive à la linguistique appliquée en côte d’ivoire: analyse et propositions p. a. kouadio etude de la structure narratologique dans «carnet d’assurance maladie» de jalāl al-é ahmad m. nazri-doust étude du portfolio de la production orale des apprenants iraniens du fle (de l’évaluation formative à l’autoévaluation) r. rahmatian, m. mehrabi & j. kahnemouipour 1-14 15-24 25-36 37-46 47-56 57- 66 abstract 67 résumés en persan ressorts écofictionnels de la nouvelle « fragment du livre de la mer » de roland wagner esfandi, esfandiar maître assistant, université de téhéran, téhéran, iran [email protected] reçu: 12.3.2013 accepté: 11.6.2013 résumé les «ecofictions», désignent les objets narratifs (filmiques ou textuels) produits grâce au «régime de médiatisation» pluriel, massif, et surtout très actuel des «thèses environnementales» la nouvelle de wagner en l’occurrence, illustre efficacement la part prise par l’auteur de l’odyssée de l’espèce, à l’esprit éco-environnementaliste. aucune prouesse technique, aucune innovation dans ce texte dont l’intérêt essentiel réside dans la manière dont il exemplifie la trace laissée par un paradigme riche de ses enjeux collectifs dans l’imaginaire culturel d’un auteur. le «fragment du livre de la mer» est une histoire ingénument narrée, ouverte au passé par son caractère merveilleux, et tournée vers l’avenir dont il établit un timide état des lieux. par l’analyse de la structure symbolique, générique, et par la déclinaison de ses pans thématiques subséquents sera mise en valeur dans le présent article l’esthétique générale de la nouvelle. au-delà, il s’agira pour nous de mettre à jour les soubassements contextuels et idéologiques à partir desquels se déploie la thématique écofictionnelle qui continue, depuis ses origines postindustrielles, à irriguer les consciences. mots-clés: roland wagner, écofiction, science-fiction, environnement, techno-science, new age. introduction en 1998, au moment de la première publication de la nouvelle de r. wagner, «fragment du livre de la mer», l’heure est, depuis deux décennies au moins, au catastrophisme en matière d’environnementalisme. aujourd’hui encore, les alarmantes hypothèses d’un james hansen à propos du réchauffement climatique en 1980 n’ont rien perdu de leur actualité. bien au contraire, elles ont conduit de fils en aiguilles au protocole de montréal relatif à la maîtrise drastique de l’usage des chlorofluorocarbures qu’on accuse volontiers de détériorer gravement le précieux revêtement d’ozone de l’atmosphère. le débat fait depuis rage, entre les environnementalistes de tous bords les uns fustigeant l’irresponsabilité grandissante des nations industrialisées ou en voie de développement vis-à-vis de la préservation de la nature et de ses écosystèmes les autres, pour minimiser le drame «médiatique» voire «trop médiatisé» du réchauffement de la planète et partant, la part de responsabilité effective de l’homme dans cette supposée dégradation environnementale et climatique. «l’écologie contemporaine sème l’effroi en pointant du doigt les signes avant-coureurs du futur qu’elle prédit» (chelbourg, 2012: 9). elle s’exprime majoritairement via les mass médias et par la voix et à travers l’action de figures médiatiques et populaires comme al gore, ex-prétendant au fauteuil 2/ revue des études de la langue française, cinquième année, n° 8, printemps-été 2013 de la maison blanche, et nicolas hulot en france, qui ne lésinent pas à faire don de leur personne pour rendre visible les termes d’un combat aujourd’hui d’avant-garde, nourrit en amont parla philosophie morale et globalement anti-techniciste des émules d’un engelhardt ou d’un jonas dont les paroles sonnent comme autant de mises en garde face à l’irresponsabilité des multinationales pollueuses et de la complaisance aveugle des états1. dans ce positionnement idéologique, la fiction n’est pas en reste. du côté de l’image, l’abondante production hollywoodienne occupe depuis quelques décennies déjà (logique commerciale oblige) le terrain fructueux de l’alarmisme à coup de scénarios catastrophes grands spectacles, climatiques (the day after toomorow) ou bio-centrés (omega man, soleil vert). le filon est porteur et mise sur la propension de l’être humain à rechercher dans le confort de son imaginaire des sentiments mêlés d’inquiétude et de consolation, d’espoir et de désespoir, etc. elle s’abreuve souvent à la source d’une littérature postindustrielle, consciente de par sa modernité, de la force relative et des faiblesses inhérentes à l’espèce humaine, de ses interactions avec le milieu, aujourd’hui et à l’avenir. il s’agit dès lors pour la fiction «(…) de rendre l’avenir présent, de le mettre sous nos yeux, afin de le maîtriser par l’imagination» dixit chelbourg (2012: 10) qui définit ainsi, en suivant gilbert durand, l’impératif anthropologique (une «hypotypose future») duquel participe l’imaginaire en général, et pour ce qui 1. voir le principe responsabilité de hans jonas (flammarion, paris, 2008). concerne notre étude, la littérature de fiction (durand, 1969: 408).un imaginaire de l’urgence écologique a donc vu le jour pour produire une ribambelle plus ou moins heureuse de fictions écologiques. les «ecofictions», désignent à ce titre les objets narratifs (filmiques ou textuels) produits grâce au «régime de médiatisation» pluriel, massif, et surtout très actuel des thèses environnementales (chelbourg, 2012: 10) la nouvelle de wagner en l’occurrence, qui illustre efficacement la part prise par l’auteur de l’odyssée de l’espèce à l’esprit éco-environnementaliste. on ne trouve aucune prouesse technique, aucune innovation formelle dans ce texte dont l’intérêt essentiel réside dans la manière dont il exemplifie la trace laissée par un paradigme riche de ses enjeux collectifs dans l’imaginaire culturel d’un auteur. le «fragment du livre de la mer» est un livre ouvert, une histoire ingénument narrée, ouverte au passé par son caractère merveilleux, et tournée vers le futur dont il établit un timide état des lieux. par l’analyse de la structure symbolique, générique, et par la déclinaison de ses pans thématiques subséquents sera mise en valeur dans cette étude, l’esthétique générale de la nouvelle. au-delà, il s’agira pour nous de mettre à jour les soubassements contextuels et idéologiques à partir desquels se déploie la thématique écofictionnelle qui continue, depuis ses origines postindustrielles, à irriguer les consciences. 1. structure et symbolique d’une fiction écologique sacrifions au réductionnisme d’usage et présentons roland wagner pour ce qu’il est: ressorts écofictionnels de la nouvelle…/3 un auteur de science-fiction. le cadre et les motifs de la nouvelle l’attestent, et bien avant, l’anthologie d’accueil dont le titre, nouvelles des siècles futures, ne laisse aucun doute quant au contenu de l’ouvrage, publié par les éditions omnibus en 2004. celui-ci regroupe un ensemble de nouvelles produites par des auteurs de tous horizons et de tous les temps. on y croise aussi bien les textes des initiateurs du genre tels que jules vernes ou h.g. wells, des maîtres anglosaxons de l’âge d’or de la sf tels qu’isaac asimov et arthur c. clarke, que des continentaux, russes ou allemands. la présentation est également diachronique : elle débute par un texte de lovecraft, traverse le siècle de toutes les inventions et se clôt sur les écrits les plus récents en matière de sf. le français wagner représente pour sa part la génération d’après 1980. son premier roman, serpent d’angoisse date de 1987 et inscrit directement son auteur dans la lignée des créatifs de l’imaginaire francophone de sa génération, au côté des ligny, genefort ou brussolo. première date et premier support de parution pour la nouvelle qui nous concerne: 1995 dans le journal de la ville de paris (avec en prime un prix eiffel). il va sans dire que le format final d’accueil, l’anthologie générique, permet un meilleur ciblage de la catégorie lectorielle à laquelle est adressée le «fragment du livre de la mer». car c’est un fait, l’imaginaire spéculatif, prospectif, le merveilleux scientifique (selon le mot de maurice renard) science-fictionnel en somme, continue de produire un profil type de lecteur ouvert aux caractéristiques d’univers du récit d’anticipation. accoutumés au sens of wonder et aux anomalies référentielles, au xéno-encyclopédisme assumé des récits et à la prodigalité inventive des auteurs et à la singularité de leurs canevas narratifs (parfois décalés sur le plan de la vraisemblance) les adeptes de la sf sont souvent sinon des convertis, du moins des familiers de la chose: l’univers, l’espèce et son devenir, déclinés suivant une liste non close d’entrées diégétiques (le voyage, la découverte, l’amour, le conflit, etc.). le récit sf est celui-là même qui optimise le questionnement relatif à l’avenir de l’homme, sous forme d’hypothèses plus ou moins colorées, en proposant des cadres diégétiques et conceptuels conformes aux questions inférées1. la sf ne se distingue cependant pas de l’ensemble de la production littéraire, fictionnelle ou non, quand il s’agit de sa dimension morale. nous disons bien morale et non moralisante au sens où celle-ci n’a pas pour vocation de conduire à des assertions édifiantes. prises dans leur ensemble, les oeuvres produites, littéraires ou cinématographiques, autorisent «(…) une analyse distanciée et pourtant empathique des ‘perplexités’ morales» (gangloff, helfrich, 2010: 16). le régime sf impose en revanche non seulement une variation d’amplitude aux perplexités existentielles mises à jour dans la littérature 1. des mondes possibles par exemple, flanqués d’une temporalité alternative. le roman spin du canadien robert charles wilson (gallimard, 2007) offre en l’espèce un cas exemplaire de traitement du concept de relativité. l’univers du récit fait cohabiter temporairement deux régimes de temporalité incommensurables, celle de la terre engoncée dans son « revêtement spin » dont la fonction est de ralentir au millionième le déroulement du temps réel, et celle du reste de l’univers, conséquemment démultipliée par rapport au temps tellurique. 4/ revue des études de la langue française, cinquième année, n° 8, printemps-été 2013 générale1, mais de surcroit, un changement d’échelle (qui s’apparente à un véritable changement de référentiel) en passant de l’individu à la collectivité, à l’homme dans son universalité. le «fragment du livre de la mer» de roland wagner exemplifie précisément, en la personnalisant avec les moyens habituels de la littérature d’anticipation (en particulier l’extrapolation scientifique ou pseudo-scientifique) et sur un mode mineur, les inquiétudes bioenvironnementales de notre espèce. 1. a. suspension générique pour forme brève à définir le «fragment du livre de la mer» est un texte court qui participe d’une définition succincte de la nouvelle science-fictionnelle: «une aventure possible à plus ou moins longue échéance» (godenne, 1995: 118). la formule donne, il est vrai, l’impression de seller le sort du genre de manière pour le moins expéditive. elle suffit cependant à particulariser la nouvelle sf comme sousgenre de la «nouvelle». par définition généralement courte et fortement cohésive, celle-ci «(…) procure au lecteur l’impression d’être fermement structurée (…)» autour donc, d’une thématique restreinte (didier, 1996: 7). la définition vaut pour le texte de wagner et pour tous les récits regroupés par jacques goimard et denis guiot dans l’imposant recueil nouvelles des siècles futurs, à cette différence près que le «fragment…» est également, nous le constaterons plus loin, redevable du «conte» ou du moins, du type 1. variation également visible dans le plus terre à terre des romans noirs (pour ce qui est de l’angoisse) ou des romans à l’eau de rose (quand il s’agit d’amour). narratif identifié comme tel par le sens commun. la nuance a son intérêt. elle évite d’assimiler trop hâtivement les deux notions car, s’il est vrai que depuis le 19ème, on laisse volontiers se superposer les termes «nouvelle» et «conte», au 18ème en revanche, le second renvoyait systématiquement à «(…) une aventure fondée sur des incidents d’une autre nature (…) ou d’un autre ordre (…)», des contes de fées, orientaux ou allégoriques donc, ou bien philosophiques et moraux (godenne, 1995: 55). au siècle suivant, il n’était plus question, pour nodier ou gautier par exemple, de démarquer les deux genres et les contes en prose et en vers (1837) du premier, ainsi que les romans et contes (1872) du suivant mélangent allègrement les deux appellations pour des textes dont la brièveté seule (et le talent) aura permis le rassemblement en volume. la distinction reste en revanche de mise aujourd’hui pour le sens commun qui n’hésite pas à relever, à la lecture du conte, certaines de ses proéminences: l’«irréalité»du contexte, l’«ingénuité» de ton et surtout, la présence textuellement marqué du locuteur par l’intermédiaire duquel le récit nous est littéralement «conté». la «nouvelle» sera par opposition perçue comme un condensé de roman un roman dépouillé de ses «fioritures», débarrassé du déploiement interminable de ses composantes au fil des pages (son personnel, ses thèmes et ses motifs, ses «voix» multiples, etc.). «fragment du livre de la mer» répond au format éditorial de la nouvelle tout en véhiculant la charge d’irréalité et d’ingénuité nécessaire au conte. il y est question de ressorts écofictionnels de la nouvelle…/5 notre future proche et d’un traitement alternatif de la problématique trinité, moderne, post et hypermoderne1: l’homme / la machine (la technologie) / la nature. ce récit à la troisième personne (dans la tradition du roman réaliste) campe un personnage seul (et solitaire) sur un bateau de pêche high tech, automatisé, suspendu à «six cents milles au large d’ouessant» (wagner, 1998: 1228). le décor est minimaliste pour une action cadre que l’on peut résumer de la sorte: une pêche cybercommandé dans un contexte d’urgence environnementale (l’époque est à la disparition progressive des mammifères marins) où règne paradoxalement un calme trompeur précédant l’apparition dans les mailles du filet du chalutier, d’un «gosse» ayant l’air «tout à fait vivant» (wagner, 1998: 1229). facteur perturbateur dans une scène liminaire tout en vraisemblance, l’improbable individu va générer l’incertitude quand à son existence effective ou imaginée (par le pêcheur belkacem le louët) qui se traduira au niveau de la représentation par l’alternance toujours hypothétique du rêve et de la réalité. l’histoire est donc centrée sur un unique personnage auquel viendra se greffer un actant nébuleux, alibi verbal d’une thèse plutôt qu’entité anthropomorphe dûment concrétisée. cette thèse: la néantisation progressive de la créativité humaine suite à la dégradation progressive du milieu pour cause d’impact environnemental (i.e) négatif de l’homme sur la biosphère, le tout conduisant au départ des mammifères 1. voir sur ce thème, gilles lipovetsky, les temps hypermodernes, nouveau collège de philosophie, paris, grasset, 2004. marins, principaux vecteurs de créativité humaine, vers une dimension parallèle. la thèse, science-fictionnelle s’il en est, interprète le concept d’«héritage bioculturel» en fictionnalisant le lien nature / société, en réifiant l’interaction entre les organismes vivants et l’environnement sous la forme féerique d’une symbiose entre l’homme et l’animal. il s’agit donc d’une écofiction, autrement dit d’une souscatégorie de la science-fiction avec laquelle il faut compter, au moins depuis la parution en 1965 de l’emblématique roman-univers dune de frank herbert2. la nouvelle de wagner prend des airs de conte quand elle flirte avec la fable animalière. elle donne également lieu à un exposé didactique et édifiant relatif à la débâcle bio-culturelle, formulé dans les termes du darwinisme et de la biologie environnementale, dans un style qui prévient le risque de dérive jargonnesque en restant d’une lisibilité cristalline (trop cristalline ?). frôlerait-elle alors (nous-y reviendrons) le traitement «bon enfant» et le risque d’être pour partie considérée comme simple historiette pour jouvenceau en mal de révolte. nous pensons que non car fort heureusement, l’actualité de la thématique (l’écologisme, la critique techniciste de la dialectique homme / machine,l’inquiétude éco-environnementale) et le traitement particulier que l’auteur réserve à son morceau didactique (le point de vue de l’homme-enfant) permettent au récit de 2. rappelons pour mémoire qu’on parle également de « fiction spéculative » concernant des romans ou nouvelles futuristes qui, contrairement à la hard sf, minorisent la place de la science. voir par exemple sécheresse de james g. ballard (1964) ou le monde vert de brian aldiss (1962). 6/ revue des études de la langue française, cinquième année, n° 8, printemps-été 2013 déployer sa charge d’imaginaire au-delà de l’apparent premier degré de dénonciation. 1. b. les entrées thématiques explicites: techno-science et éthique de l’environnement le récit ouvre donc un champ thématique à l’alarmisme écologique et à la technoperplexité ambiante. celle-ci n’a évidemment pas attendu les années 90 pour s’exprimer à travers le médium artistique, élitiste ou populaire, dans les ouvrages de jacques ellul ou sur grand écran. on se souvient de l’impact sociétal du film soleil vert qui incita, image de marque et philanthropie obligent, les grandes firmes, usines et manufactures des pays développés à reconsidérer la douteuse efficience du traitement de leurs rejets industriels.le débats des «antis» à pris aujourd’hui des allures de méli-mélo où viennent se croiser sous une même bannière, les préoccupations technophobes, pro-environnementales ou anti-progressistes, chacune légitimes malgré la cacophonie médiatique à laquelle elles sont susceptibles de donner lieu (pour preuve les multiples sommets qui se croisent sans se rencontrer). dans ce contexte l’écofiction gagne, en sus de sa vocation à divertir, celle de rendre compte de l’angoisse ambiante face à l’apparent dérèglement de l’équilibre biologique nécessaire à la survie des espèces (la nôtre comprise) et de leur habitat. elle est «(…) une manière d’entrer en résonnance avec l’imaginaire d’une époque fascinée par sa puissance et terrifiée par un avenir dans lequel elle ne sait plus lire que des promesses de déclin» (chelbourg, 2012: 229). ces préoccupations comblent, sous la forme de constats dramatisés et à faible renfort de personnages, la vacance topographique projetée par le «fragment du livre de la mer», dont le principal protagoniste sait pertinemment que sa «machine» (son chalutier) est (…) plus compétente que lui (wagner, 1998: 1233). il reconnaît l’infime place réservée à l’humain dans un monde «automatisé» où les campagnes de pêche se satisfont d’un seul et unique membre d’équipage, et ce, malgré la législation maritime faussement humaniste qui stipule qu’«(…) aucun ordinateur ou réseau d’ordinateurs ne [doit] être laissé sans surveillance humaine aux commandes d’un engin motorisé» (wagner, 1998: 1228). la remarque a valeur d’aveu et dépouille le facteur humain de sa qualité d’agissant. il s’inscrit ainsi en filigrane du récit, une image dystopique du progrès technologique que l’évolution du texte et son dénouement viennent définitivement conforter: belkacem cède à l’appel de la mer et s’en va rejoindre les mammifères en partance vers une énième utopie, cette fois pareillement partagée par l’homme et l’animal. «il subsistait si peu de poisson dans les océans (…)» (wagner, 1998: 1229) nous dit le narrateur. citation à laquelle répond en échos cette information déjà ancienne: «l’::::union:::: internationale pour la conservation de la nature (l’uicn) estimait en 2008, que plus de 20% des 5400 mammifères de la planète étaient menacés» (vernier, 2011: 92).la disparition apparente des mammifères marins est alors contrebalancée, en imagination, par leur scission d’avec l’actuel règne humain et leur accession à un «(…) univers où avait fui toute l’imagination du monde» (wagner, 1998: 1238). la nouvelle exemplifie ressorts écofictionnels de la nouvelle…/7 concrètement et symboliquement le technoscepticisme et l’importance de l’«empreinte écologique» de l’homme1. elle laisse apparaître d’une part une non-relation entre le personnage principal et la «machine» en déplaçant la part constructive de l’action vers le chalutier «entièrement automatisé», en neutralisant l’habituel statut actantiel de l’homme, en réduisant son rôle à celui d’observateur passif d’autre part, elle met en scène les conséquences de la surexploitation de la nature, la situation d’«overshoot» (viel, 2006: 34) à laquelle est actuellement confrontée notre civilisation, en la déplaçant vers la fable futuriste. ainsi thématisé et finalisé, le récit prend la forme d’une chronique dysphorique (pour une fin annoncée) et rend synthétiquement compte, le format de la nouvelle aidant, d’un état de civilisation à venir. 1. c. le recourt au nivellement représentationnel l’événement central autour duquel se construit le récit est sans conteste la découverte de l’enfant dans les mailles du filet du chalutier. l’invraisemblance de la situation ouvre d’emblée la porte au nivellement représentationnel et à la modélisation de la réalité intratextuelle: «[le navigateur] crut tout d’abord se trouver en présence d’un poisson d’une espèce inconnue, dont la forme évoquait celle d’une main. puis il vit le poignet, et une partie de l’avant-bras qui y était attaché, et il comprit 1. le concept d’«empreinte écologique» a été développé conjointement par mathis wackernagel et william rocs dans les années 1990 et consiste, très schématiquement, en «(…) une mesure simplifiée de la pression exercée par l’homme sur la nature» (dominique viel, ecologie de l’apocalypse, 2006, p. 33). qu’il ne s’agissait pas d’un poisson » (wagner, 1998: 1229). la suite du récit sera fortement tributaire du point de vue de belkacem et du degré de réalité qu’il confère à l’apparition. le rêve et la réalité vont dès lors se partager alternativement l’espace du texte pour finalement se superposer au terme du récit. quatre moments sont à prendre en compte dans l’ensemble de la représentation. 1/ la scène d’exposition qui, par la vacuité du cadre présenté (l’eau et le chalutier) fait office d’«appel d’air» à l’événement «singulier» et à sa charge fictionnelle. 2/ l’événement en tant que tel (l’enfant) qui s’insinue dans la diégèse comme un motif fantastique pour faire entrer le récit dans sa phase alternative: rêve et réalité, rationalisme et irrationalité vont se partager les trois quart restant de la nouvelle. 3/ le rêve est ensuite explicitement introduit en prévision d’un prochain et imminent basculement onirique: «(…) il s’était laissé emporter par le flot onirique jusqu’au petit matin (…) la couchette était vide (…). etrangement, il éprouva plus de difficulté à envisager la réalité de cette rencontre impossible qu’il n’en avait rencontré un instant plus tôt pour admettre qu’il s’agissait seulement d’un rêve de marin trop solitaire» (wagner, 1998: 1231). l’introduction du thème du rêve est précédée de son contexte, un jeu de motscroisés dont «(…) les grilles à demi remplies le poussèrent à prendre un crayon» et à rejoindre le royaume de morphé. 4/ escamotage de la scène rêvée, ultérieurement retranscrite sous forme d’un monologue au statut ontologique incertain. durant son sommeil, belkacem a pris des 8/ revue des études de la langue française, cinquième année, n° 8, printemps-été 2013 notes qu’il s’applique à remettre dans l’ordre à son réveil. une fable scientiste s’ensuivra sous les traits d’un long discours rapporté, au cours duquel l’énigme de l’enfant trouvé trouvera sa résolution. durant son sommeil (provoqué ?) belkacem rédige à son corps défendant (télépathie oblige) une manière de charte racontée en faveur de la préservation de l’environnement. il en ressort un récit enchâssé, sorte d’îlot énonciatif quasi autonome et fortement axiologique. il relate une histoire alternative de la terre qui doit beaucoup à la logique darwinienne de la prolifération sélective des espèces, aux discours relatifs à leur capacité d’adaptation, ainsi qu’à leur complémentarité. ce morceau didactique offre une vue succincte de «(…) l’histoire de la planète. l’histoire de la vie, de son évolution obstinée, de ses innombrables mutations» (wagner, 1998:1234). le texte associe allègrement lecture et interprétation naturaliste du vivant, au spiritualisme new age dont il sera plus loin question: «la symbiose qui unit l’ensemble des créatures vivantes est plus profonde qu’il n’y paraît. il ne s’agit pas seulement d’un système fonctionnant en vase clos, d’un processus pour ainsi dire mécanique d’association entre les espèces. elle possède également une dimension spirituelle – dont les cétacés, et plus particulièrement les dauphins, sont les catalyseurs. nous régulons l’harmonie psychique de ce monde» (wagner, 1998: 1234)1. la sobriété de ton, tire le discours vers le compte rendu zoologique alors même que le traitement réservé au motif du dauphin le rattache à la féerie animalière. le 1. c’est nous qui soulignons. rêve est le lieu d’une inférence surnaturelle qui rationnalise l’inconcevable. paroles positives et fantasmagorie onirique traverse le récit en suspendant sa charge de réalité. et c’est bien à l’omniprésent motif de la rêverie que le récit doit le maintient de son atmosphère d’incertitude tant représentationnelle que générique. car d’une part, la posture psychologique dubitative du personnage se répercute sur l’ensemble du récit et suspend l’identification ontologique de l’univers configuré par celui-ci, et d’autre part, la sauvegarde de cette incertitude ontologique empêche la cristallisation générique de l’histoire jusqu’à son dénouement. autrement dit, le positionnement générique du lecteur ne cesse de balancer entre récit merveilleux et science-fiction. les motifs de la fable (l’enfant, les mammifères, la poésie marine) interfèrent avec ceux du discours rationnel sur la préservation de la nature, de la beauté et de la créativité. des profondeurs de la mémoire de belkacem «des bribes de légendes anciennes remontèrent, nous est-il dit, telle une déferlante sur la crête de laquelle surfaient cités englouties, hommespoissons, sirènes à la voix enchanteresse, dieux atrabilaires armés de tridents et déesses voluptueuses juchées sur des coquillages géants» (wagner, 1998: 1230). des images fantasmagoriques en puissance, et qui le disputent, répétons-le, à la retranscription par le navigateur de l’idiolecte scientifique des naturalistes et des protecteurs de la nature, à même les pages d’un magazine (état de transe ou de sommeil aidant). ressorts écofictionnels de la nouvelle…/9 2. les soubassements new age de la nouvelle un récit naturaliste donc, qui choisit comme décors l’océan, niche écologique à l’échelle du monde, et comme mode de narration, celle à la troisième personne qui permet d’établir avec objectivité (le sujet est sérieux et présenté comme tel) une distance respectable avec l’événement décrit. la focalisation interne et l’adoption du point de vue du personnage par le narrateur confère alors ponctuellement à l’histoire un supplément d’intensité (psychologique) et permet aux lecteurs d’en percevoir toutes les virtualités (le monde objectivement décrit en même temps que les doutes du personnage). l’auteur, par l’intermédiaire du décor et de la perspective narrative compose ainsi, avec un art consommé du dépouillement, une nouvelle dont la seule dimension dénotative suffit à asseoir le caractère édifiant. or, une esthétique impliquant toujours des présupposés, c’est sur d’autres thèses, contemporaines et particulièrement prégnantes dans le contexte d’urgence environnemental actuel que l’on débouche en remontant le fil de la symbolique écofictionnelle de ce bien nommé «fragment du livre de la mer». 2. a. la nébuleuse de «l’age du verseau» qu’on les considère comme spiritualistes, millénaristes, animistes, ces thèses associent indistinctement des croyances mystiques anti-créationnistes qu’il serait malaisé de rattacher à une chapelle particulière. on parle alors de new age pour désigner dans leur ensemble, toutes les philosophies qui prônent l’«éveil spirituel» moyennant un retour de l’individu sur lui-même et sur le monde. «(…) il n’y a donc rien de moins nouveau que le new age» comme le note massimo introvigne, spécialiste du mouvement, qui ajoute que tout ce qui relève de «l’idée de changement d’époque», millénarisme oblige, peut être considéré comme «point de départ» du new age (introvigne, 2005: 52). on considère malgré tout que c’est dans la californie des années 1960 et sa contreculture «hippie» que le new age aura trouvé sa géographie d’élection, avant d’être théoriser par marilyn ferguson en 1980, dans son ouvrage, les enfants du verseau. le titre du livre fait référence à un ouvrage bien antérieur, l’ere du verseau, rédigé en 1937 par le français paul le cour (1871- 1954) un féru d’astrologie qui plaçait dans le signe du verseau une espérance toute particulière.1 de cette «ere du verseau» chère aux plus ésotériques parmi les adeptes de l’astrologie, il est dit qu’«(…) elle débute lorsque le lever du soleil à l’équinoxe de printemps passe du signe zodiacal des poissons à celui du verseau (sic)» et par la suite et surtout plus prosaïquement, que le signe du verseau symbolise «(…) l’effusion bénéfique et fertilisante de la prospérité et de la paix» (vernette, 1993: 3).cette aspiration à une nouvelle ère de béatitude, en vogue depuis les années 1960, s’est un temps généralisée en puisant son inspiration dans les sources orientales (indouisme, tantrisme, etc.). elle signale par-dessus tout le retour d’une forme d’animisme contemporain qui jadis «(…) caractéris[ait] l’alchimie de la renaissance italienne» (chelbourg, 2012: 32) et constitue à ce titre une aspiration 1. comme l’indique le sous-titre de son livre: «le secret du zodiaque, le proche avenir de l’humanité». 10/ revue des études de la langue française, cinquième année, n° 8, printemps-été 2013 également occidentale qui s’est décliné aussi bien dans les termes de la religion chrétienne d’une alice bailey (théosophe qui, dans entre les années 20 et 30 professa le retour du christ) que dans ceux, écologiques, de james lovelock, scientifique britannique dont l’ouvrage la terre est un être vivant fut publié en 1980, parallèlement au livre les enfants du verseau de m. ferguson. le thème de la quasi-sacralisation de la terre-mère était déjà présent chez goethe ou novalis. pour lovelock en revanche, dont la vision du monde rejoint celle projetée par l’univers configuré par roland wagner dans sa nouvelle, le thème de la préservation vient doubler le panthéisme des romantiques allemands: la planète terre est un organisme vivant dont l’interconnexion des parties, évidente en tant que telle, force la conscience humaine à muer en conscience écologique1. l’enfant de la nouvelle qui s’en est allé rejoindre les dauphins au large d’ouessant, qui entre en symbiose avec le règne des cétacés, qui fait office d’interface entre ce règne et celui de l’homme pour communiquer un solennel message de mise en garde contre la destruction des biotopes et la déperdition des équilibres environnementaux et plus particulièrement, contre «le véritable empoisonnement de certaines mers» (wagner, 1998: 1235). cet enfant actualise symboliquement l’accession à une forme symbiotique d’unité ingénument prônée par les partisans du verseau et autres 1. dans son ouvrage, il regroupe ses hypothèses quasi animistes sous le titre générique d’ « hypothèse gaïa (terre mère) ». adeptes du mdph (mouvement de développement du potentiel humain).2 2. b. channeling et imaginaire du lien par la mise en scène de l’interdépendance d’entités organiques supérieurs telles que l’homme et le dauphin, la nouvelle de wagner prend donc le chemin de la fable mystique. elle laisse ressurgir d’anciennes conceptions animistes, celle chère à kepler d’une «âme du monde» par exemple, ou bien celles de giordano bruno et de tommaso campanella qui, comme le note chelbourg, s’appuyant sur des visions issues de la tradition stoïcienne, «(…) présentaient l’univers comme un gigantesque animal dans lequel les autres êtres vivants, et notamment la terre, étaient comme emboîtés.» (chelbourg, 2012: 28). le lien fictionnel dont il est question dans le «fragment…», la voix sublimée de l’enfant l’exprime dans les termes de la «complémentarité» et de la «cohésion»: «nous ne faisons qu’un. nous sommes le biote. le tout plus grand que la somme de ses parties, où chacun joue un rôle, de l’humble bactérie à la pensive baleine» (wagner, 1998: 1234). la vision mystique précité qui est également celle du tantrisme moniste pour lequel «tout est un», est ici réinvestie par le discours scientiste où viennent se mêler les résurgences new age du vitalisme (perçu sur un mode ludique par les enfants en bas âge, et parfois désiré par les adultes): «peut-être est-ce cette vague mémoire de son histoire génétique qui a permis à la vie de se montrer si efficace» 2. voir sur ce sujet la liste exhaustive des différents mouvements prétendument d’ « éveil spirituel » dans l’ouvrage de jean vernette cité dans la bibliographie. ressorts écofictionnels de la nouvelle…/11 (wagner, 1998: 1234) nous est-il dit du miracle de l’existence, sur un mode pour le moins anthropomorphique et des créatures enfin, il nous est dit que «(…) toutes [celles] composant le biote sont nos soeurs» (wagner, 1998: 1234) en rattachant cette nouvelle version de l’imaginaire du lien au registre religieux. a propos du lien toujours, et de la déclinaison thématique qu’il autorise, il faut noter qu’elle mise sur une autre entrée (et non des moindres) de la nébuleuse new age, le channeling ou le principe de communication des êtres par-delà les dimensions1. ici encore le syncrétisme prime et englobe, derrière l’idée d’un type transcendantal de communication, des références à la gnose des lointaines limites de la méditerranée et du moyen-orient, et d’autres références tirées du vocabulaire de la moderne société théosophique2. la gnose ou «connaissance» oeuvra en son temps pour la mise en valeur de la part de réalité invisible contenue, inégalement, dans les trois systèmes platoniciens, pythagoriciens et stoïcien. elle «(…) visait à permettre à l’âme humaine émanée des mondes supérieurs, d’en retrouver le chemin et de les rejoindre en réintégrant son appartenance au ‘plérôme’ [la plénitude] éternel» (vernette, 1993: 25). la société de théosophie de son côté, a contribué à mythifier cette même réalité inaccessible au profane en imaginant la catégorie pour nous 1. pour une vue exhaustive du channeling, voir l’ouvrage de référence de wouter hanegraaf, new age religion and western culture, state university of new york press, 1998. 2. association fondée en 1875 par helena petrovna blavatsky pour promouvoir et diffuser la doctrine théosophique néo spiritualiste inspirée par cette dernière. merveilleuse des «ascended masters» qui comprend «(…) des êtres humains qui, libérés du cycle des réincarnations, continuent cependant par compassion à s’intéresser à la vie historique des hommes et des femmes (…)» (introvigne, 2005: 14) à maintenir avec ceux-ci un lien spirituel (ô miracle de la magie!) par transmission de pensées3. le channeling actualise ces originelles versions de la télépathie transindividuelle réservée aux initiés d’un ésotérisme antique et élitiste par un procès de désenchantement (relatif), en rendant la communication spirituelle accessible à tous moyennant la pratique de techniques d’«élargissement de l’âme». dans cette optique, et «(…) à mesure que la conscience individuelle devient plus consciente d’ellemême, nous est-il dit, elle se découvre comme simple parcelle de la conscience cosmique» (vernette, 1993: 13) et les parties peuvent ainsi communiquer entre elles et avec le grand tout4. quand à notre fable marine, s’il est vrai qu’elle participe de la mystique explicitement formulée de la correspondance des choses, sa parenté directe avec le registre new age reste à prouver. de sérieux liens d’homologie apparaissent néanmoins, qui permettent d’associer le récit de la transsubstantiation merveilleuse d’un homme à l’univers aquatique des cétacés supérieurs. «mon peuple sait depuis longtemps comment employer les courants transversaux qui franchissent les univers» 3. l’inde bien évidemment connaît ce type de divinités, des « maîtres de lumière », aptes selon certaines croyances populaires à entrer en comm::::union:::: télépathique avec leurs ouailles. 4.« dans le meilleur des mondes possibles » serionsnous tenté de dire ironiquement à propos de ce spiritualisme pour le moins arbitraire. 12/ revue des études de la langue française, cinquième année, n° 8, printemps-été 2013 affirme l’enfant-dauphin (wagner, 1998: 1235) qui clame par ailleurs péremptoirement : « nous régulons l’harmonie psychique de ce monde » (wagner, 1998: 1234) mais aussi: «nous étions le moteur de ce monde. son esprit de création, son inventivité» (wagner, 1998: 1235). cette phrase enfin, qui tombe comme une sentence à rebours: «(…) vous avez détruit notre biotope» (wagner, 1998: 1235) et qui associe définitivement le récit à la mystique écologique de la nébuleuse du verseau. autant d’assertions qui orientent (à son corps défendant?) la fiction de wagner à l’intérieur de la sphère d’influence du new age en la parant des attributs récréatifs de la science-fiction. 3. l’«esprit dauphin»: ouverture thématique que le new age soit susceptible de donner du grain à moudre au moulin de la sciencefiction, c’est un fait que le récit de wagner illustre à sa façon. il serait cependant réducteur de limiter la compréhension du texte à une interprétation de type idéologique quand on constate à quelle autre source de l’imaginaire populaire mais aussi scientifique, le bestiaire (il est vrai limité) de la nouvelle peut aisément être associé. une figure pour le moins annexe renvoie plaisamment l’imaginaire de l’enfantpoisson du «fragment…» aux planches et aux bulles du 9ème art, en format de poche et en noir et blanc. en octobre 1978 paraissait en effet aux éditions mon journal, la bandedessinée antarès (du nom de son personnage principal) de juan escandell. la bd en question est une chronique de la vie aventureuse d’antarès, un jeune garçon amphibie aux origines extraterrestre incertaines qui hante les océans du globe en compagnie d’un fidèle et loquasse dauphin tursiops. réservé à un lectorat de jeunes, le récit d’antarès est en tout point sommaire (c’est la règle du genre). la bd permet néanmoins d’actualiser l’immémoriale figure de l’homme-poisson, idéalement incarné par le mythologique poséidon et les multiples déclinaisons du mythe de l’atlantide et de ses habitants. par le biais de l’homme-poisson se voit ici réalisé l’infantile phantasme de la communication homme / animal (auquel ne seront pas les derniers à souscrire les actuels passionnés de la gente canine toutes tranches d’âge comprises (sic)). le cas n’est pas rare dans la science-fiction dont l’une des caractéristiques (et non des moindres) est d’accueillir dans ses pages les craintes et les angoisses les plus primitives et les plus instinctives de l’homme. l’animal y tient souvent une place de choix, dans sa version anthropomorphe ou franchement antianthropomorphe (de par son étrangeté) 1. «la science-fiction est plutôt un des derniers refuges où l’imaginaire se donne des monstres à haïr et à détruire, où l’animal à encore sa fonction de repoussoir d’humanité (…)» note alexandre hougron dans des pages consacrées, entre autres et dans une optique psycho-sociologique, au statut de l’animal dans la sf (hougron, 2000: 44). il s’agit de la part d’animalité inscrite en l’homme, honni et traquée aux moyen-âge déjà par la société et les gardiens de sa 1. les exemples ne manquent pas de romans qui misent sur l’aversion ressentie au contact des bêtes ou de leurs ersatz fictionnels. l’île du docteur moreau et les premiers hommes dans la lune de h. g. wells en constituent deux exemples canoniques. ressorts écofictionnels de la nouvelle…/13 morale, et dont il resterait encore, dans la sf, «(…) quelque chose du côté de l’exutoire ou du fixateur d’un incompréhensible résidu (d’animalité, précisément) et ce malgré toute la civilisation et la technologie accumulée» (hougron, 2000: 44). il est d’ailleurs significatif que le chaos consubstantiel au monde était anciennement représenté par un animal d’origine aquatique. seulement, modernité et conscience écologique obligent, une autre vision de la bête est venue supplanter la charge négative de l’image véhiculée par l’animal. et c’est donc à un juste retournement des choses que nous convie wagner dans sa nouvelle en réinvestissant l’eau et sa faune de vertus bénéfiques, positives comme celle évoquée par le symbole du porteur d’eau étancheur de soif de l’ancien zodiac. les dauphins «(…) avaient autrefois symbolisés la migration des âmes» (wagner, 1998: 1237). comme le découvre belkacem dans ses lectures, en attendant de rallier les profondeurs de la mer à dos de dauphin, «(…) dans cette autre univers où l’océan était propre» (wagner, 1998: 1238). l’écofiction moderne suit le sillon freudien de la déculpabilisation vis-à-vis des instincts primaires et de leurs récipiendaires symboliques, les bêtes. elle illustre, comme le fait en général toute fiction soucieuse de puiser dans les différents discours épistémiques de quoi nourrir sa propre matière et sa propre évolution. les correspondances ne manquent pas, réelles et symboliques entre l’ordre de la création et celui des sciences, historiques, humaines ou positives. a ce titre, un dernier lien mériterait d’être établit, entre notre nouvelle et l’ouverture d’une certaine perspective de recherche rendue officielle lors d’une assemblée scientifique des plus sérieuses, la huitième international daulphin and whale conference qui s’est tenue à paris en novembre 1999. les débats, organisés par communicare, une association installée en australie, s’était fixée pour objectif «(…) de rassembler des spécialistes de différentes disciplines afin qu’ils puissent, ensemble résoudre l’énigme des messages qu’adressent les dauphins et les baleines aux humains» (servais, 2000). et l’

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